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Un certain cinéma
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15 mai 2014

West Side Story, de Robert Wise (1961): un quartier pauvre, deux bandes rivales, et un amour

West Side Story a une place particulière dans mon coeur: c'est la première comédie musicale américaine que j'aie vue (enregistrée sur Arte en... euh... 1998), et la seule que j'aime. Un détail loufoque: lors du premier visionnage, je ne m'aperçus pas que c'était Roméo et Juliette revisité, tant j'étais prise dans l'histoire. Il fallut l'intervention d'une camarade de classe de 3° pour que je fisse le lien entre William Shakespeare et les gangs du West Side.

L'histoire, c'est donc New York et deux gangs qui ne peuvent pas s'encadrer: les Jets (des Américains d'origine polonaise, italienne ou suédoise) et les Sharks (des Portoricains nouvellement débarqués). Au milieu, Tony (Richard Beymer), un ancien des Jets, aime Maria (Natalie Wood), la soeur du chef des Sharks. Ils s'aiment, ils se le chantent, les deux gangs se déchirent autour d'eux en chansons, se battent par entrechats interposés, et tout cela fini évidemment mal. 

le clan des Portoricains: Bernardo, chef des Sharks, et Anita, sa fiancée, pendant le bal.

L'extraordinaire, dans ce film, c'est de faire avec une histoire toute simple des moments de grâce: quand Tony et Maria chantent leur amour sur des escaliers de secours, on pleure; lorsque Marie chante sa joie d'être aimée, au milieux des rouleaux de tissus de la mercerie à trois sous qui l'emploie, on danse; quand Tony se fait tuer, on est désespéré. L'extraordinaire, c'est également de faire passer des messages presque sociaux sur les quartiers de la Grosse pomme d'une façon en apparence anodine, mais en réalité très puissante. La chanson "America", entonnée par les Portoricains, est à cet égard édifiante: on y chante la vision idéale qu'avait chaque émigré de l'Amérique, et les déceptions souvent cruelles trouvées une fois sur place. Le choix de composer la bande des Jets d'enfants d'émigrés récents est également significatif: tous sont finalement des étrangers dans leur pays d'adoption, et se battre pour un bout de quartier symbolise leur volonté de se battre pour exister aux yeux de l'Amérique. Détails vestimentaires importants pour distinguer les deux bandes: les Jets sont chaussés de baskets, vêtus de pantalon et de t-shirt de couleurs claires, assortis à leur blondeur et à leurs yeux bleus. Les Sharks sont chaussés de Converse, vétus de jean noir et de marcel sombre, assortis à leur teint hâlé et leurs cheveux bruns. Au dernier visionnage que j'ai fait du film, j'ai été frappé par ces détails, par les couleurs gorgées de Technicolor qui imprègnent encore la pellicule, et par un fait significatif: les héros, même jeunes, même de la rue, ne sont plus en pantalon de costume et en chemise, alors que c'était encore la règle, même dans les films pour teenagers. Merci Marlon Brando et son blouson de cuir!    

les Jets: Riff et sa copine Graziella. Au dancing, la cravate est de rigueur

Si la lutte pour un bout de rue est vitale, aucune des bandes ne pensent sérieusement à laisser sa vie dans l'affrontement. Le basculement dans la tragédie est donc stupéfiant, irréversible. Quand Riff (Russ Tamblyn) puis Bernardo (George Chakiris) trouvent la mort sous un pont autoroutier, Shakespeare est là, tout près.

Les comédies musicales m'ennuient le plus souvent. Celle-ci, jamais. L'alternance fluide entre les danses, les chants et les dialogues est si évidente qu'on se laisse porter sans résistance. Le jeu des acteurs, simplement naturel et impeccable, s'y glisse parfaitement. Et la sincèrité de chacun des protagonistes ne peut qu'abattre les dernières résistances. Je l'avoue, j'ai un faible pour George Chakiris, le chef des Sharks: je rends les armes devant sa grâce si virile quand la danse... Le couple formé par Natalie Wood et Richard Beymer est aussi un petit miracle: du même âge, ils s'accordent parfaitement et lorsqu'ils tombent amoureux, oui, on y croit.

affiche West Side Story

WEST SIDE STORY

United Artists, 1961

Réalisation: Robert Wise et Jérôme Robbins (pour la danse), d'après la comédie musicale d'Arthur Laurents, Stephen Sondheim et Leonard Bernstein

Photographie: Daniel L. Flapp

Avec: Natalie Wood (Maria), Richard Beymer (Tony), Russ Tamblyn (Riff), Rita Moreno (Anita), George Chakiris (Bernardo), Simon Oakland (le lieutenant Schrank), Ned Glass (Doc), William Bramley (l'officier Krupke) 

Premier visionnage: Arte

Fils de Robert Wise: West Side Story, le Récupérateur de cadavres 

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