Deux oscars, puis plus rien: qui est Luise Rainer?

Luise Rainer, ce nom ne dit plus rien à personne, pas même aux cinéphiles avertis. Si on se rappelle de Barbara La Marr, Tom Mix, Anita Page ou Joel McCrea, même sans avoir jamais vu aucun de leurs films, avec Luise, c'est le néant total. Et pourtant, Luise Rainer est une femme d'exploit dans son genre: elle fut la première a recevoir deux oscars de la meilleure actrice, deux années de suite, en deux nominations! Carton total, donc, et malgré cela, on ne se rappelle ni de son visage, ni de ces fameux deux films qui lui ont valu la récompense ultime pour Hollywood, ni de sa vie. Luise Rainer devait être hors système. 

D'abord, une constatation: Luise Rainer est née en 1910... et elle est toujours vivante! Les Oscars conservent, c'est certain. Autrichienne d'origine, formée par Max Reinhardt, elle interprète des bricoles en Allemagne avant de traverser l'Atlantique. La MGM la trouve prometteuse, et lui confie deux rôles importants: Anna Held dans The Great Ziegfeld (Leonard, 1936) et O-Lan dans Visages d’Orient (The Good Earth, Franklin, 1937). Les deux rôles lui valent les fameux Oscars, l'un en 1937, l'autre en 1938. Quelques mots sur les deux films: The Great Ziegfeld raconte la vie de Florenz Ziegfeld, comme on peut s'en douter; Anna Held était une performeuse de Broadway et vivait maritalement avec Ziegfeld. Visages d’Orient est l'adaptation d'un roman de Pearl Buck, The Good Earth, traduit en français par... la Terre chinoise. Oui, le livre a un titre, le film un autre, mais c'est la même source!

Au jeu des Oscars, notre Luise bat donc Bette Davis, qui reçoit son premier Oscar en 1936, et le second en... 1939, Katharine Hepburn, qui rafle deux Oscars consécutifs en 1968 et 1969, et Vvien Leigh, qui récupère deux Oscars en deux nominations, en 1940 et 1952 (également Hilary Swank, mais là c'est franchement plus tardif). Une vraie recordwoman! Malgré cela, on ne peut que se dire, au vu de la suite de sa carrière, que la roche Tarpéienne est vraiment près du Capitole. Après ces deux années de triomphes, Luise tourne encore quatre fims dignes d'intérêt: le Secret des chandeliers (The Emperor’s Candlesticks, Fitzmaurice, 1937), La Grande ville (Big City, Borzage, 1937), Frou-Frou (The Toy Wife, Thorpe, 1943) et Dramatic School (Sinclair, 1938). La MGM et elle-même sont déçus du résultat, et se séparent. Après un dernier film en 1954, tourné par Leni Riefenstahl (Tiefland), Luise disparaît tout à fait du monde du cinéma - et des chroniques mondaines.

Une chute aussi rapide que le fut son ascension, et une vie, finalement, sans histoire.